Dossier

LES GISEMENTS DE VERTEBRES FOSSILES DU
TERTIAIRE CONTINENTAL DU TARN
(PALEOGENE)
UN PATRIMOINE GEOLOGIQUE PEU CONNU

INTRODUCTION

 

Les bassins du Castrais et de l’Albigeois appartiennent à la bordure orientale du Bassin d’Aquitaine.

Les dépôts qui s’y développent correspondent à un remplissage sédimentaire déposé il y a entre 45 et 20 millions d’années, dâge paléogène (Paléocène, Eocène et Oligocène), épais de plusieurs centaines de mètres, véritable « golfe » limité à l’Est par les hauteurs des Monts du Sidobre et de l’« Albigeois cristallin », au Nord, par le massif de Grésigne et, au Sud, par la Montagne Noire.
Les sédiments, de type molassique, sont une superposition de couches alternativement conglomératiques, gréseuses, argilo-sableuses et calcaires, globalement basculées d’une dizaine de degrés vers l’Ouest et se disposant en auréoles concentriques ouvertes vers l’Ouest. Les couches les plus récentes (d’âge oligocène) se situent ainsi à l’Ouest et tandis que les plus anciennes (d’âges paléocène probable à éocène) se placent à l’Est où elles reposent en discordance sur la surface d’érosion post-hercynienne des terrains paléozoïques de la Montagne Noire et des Monts du Sidobre et de l’Albigeois.

Les dépôts s’y organisent en deux entités structurales distinctes :

Au Sud, le Bassin du Castrais : Dépression d’orientation est-ouest axée par les vallées du Thoré et de l’Agoût.
A l’Est, les Argiles à graviers d’âge Paléocène à Eocène inférieur, s’enfoncent en coin dans une gouttière étroite, le « Sillon du Thoré », le long de laquelle elles atteignent le méridien de Lacabarède.
Entre Castres et Labruguière, les couches s’étalent au niveau d’un vaste causse de calcaire lacustre d’âge éocène moyen. Au Sud, elles viennent butter contre l’abrupt de la faille qui limite le versant nord la Montagne Noire.
La partie occidentale du Bassin du Castrais est occupée par des terrains tendres de composition molassique, sableuse ou argilo-sableuse, d’âge éocène supérieur à oligocène. Ces couches sont armées par des bancs plus durs, bancs de grés (par exemple, « Grés des Monts de Saix », « Conglomérats du Puylaurentais ») ou bancs de calcaire lacustre (par exemple, « Calcaire de Saint-Martin-de- Damiatte », « Calcaire de Briatexte »).

Au Nord, le Bassin de l’Albigeois :
Il est séparé du bassin du Castrais par le « Môle de Réalmont », zone haute à partir de laquelle on assiste à la réduction puis à la disparition totale des dépôts de l’Eocène inférieur et moyen qui comblaient l’essentiel de la dépression du Castrais.
- Dans le Bassin de l'Albigeois, c’est à l’Eocène terminal, puis, plus au nord, à l’Oligocène inférieur, qu’il faudra attribuer les couches tertiaires les plus anciennes (Argiles à graviers) qui reposent sur le socle primaire. Leur succédant, les couches alternativement argilo-gréseuses et calcaires de l’Eocène terminal et de l’Oligocène s’organisent de façon plus ou moins tabulaire.
Les calcaires lacustres y présentent un très important développement, au Sud de la vallée du Tarn (Calcaire de Marssac, Calcaire d’Albi) et, surtout, au nord de celle-ci où plusieurs plateaux tabulaires découpés par la vallée de la Vère sont connus sous le nom de « Causses de Cordes ».
A l’Ouest du promontoire de la Grésigne, le domaine des Molasses du Tolosan et de l’Agenais offre des paysages de basses collines et un terrain uniformément argilo-sableux, tendre, qui s'étend jusqu'à la vallée de la Garonne.


Carte géologique schématique du Département du Tarn, par J. Rey (2011) montrant la disposition en amphithéatre des terrains primaires et secondaires autour d'un bassin tertiaire dont les sédiments eocènes (en orange) et oligocènes (en jaune) se disposent en auréoles concentriques ouvertes vers l'Ouest. Bassin du Castrais et Bassin de l'Albigeois sont séparés par le Môle de Réalmont que prolonge la vallée du Dadou .


Ces sédiments continentaux ont fourni, depuis le milieu du XIXème siècle, une quantité considérable de restes de vertébrés de l’Eocène et de l’Oligocène, essentiellement de mammifères, mais aussi de reptiles parmi lesquels de nombreux crocodiliens et chéloniens (tortues).

Cette richesse paléontologique qui avait, au IXème siècle, fait la réputation des gisements tarnais, est largement oubliée depuis.
Les découvertes les plus nombreuses se sont en effet principalement échelonnées entre les années 1850 à 1900, grâce notamment à divers grands travaux tels le percement des voies ferrées Castres-Albi et Toulouse-Albi (gisements du Lautrécois, Saint-Géry,..). Elles étaient favorisées par le nombre des petites exploitations de matériau de construction (Saint-Martin-de-Casselvi, Denat... ) ou de marne à briquèterie (Pont-d’Assou, Rabastens, Colombaylet...) et par le caractère artisanal des moyens d’exploitation.
Depuis, malgré l’importance et l'omniprésence des travaux autour des agglomérations (élargissement de routes, percement de rocades, d’autoroutes, nombreuses fondations d’habitations,…) vraisemblablement en raison de la mécanisation des moyens, peu de nouvelles découvertes sont venues enrichir les faunes du Tertiaire tarnais.

Ce patrimoine exceptionnel se présente sous deux statuts distincts :

. Patrimoine « in situ ». Il compte plus d'une centaine de géosites, « gisements » anciennement exploités, dont seule une minorité a pu être repérée, certains pouvant faire l’objet d’une mise en valeur, au moins pédagogique, si ce n’est de mesures limitées de protection.

. Patrimoine « ex situ ». Il est exceptionnel si l’on considère l’« épuisement » ou la disparition totale de la plupart de ces gisements anciens et l’extrême richesse des collections que conservent le musée et l'université de Toulouse, les musées de Paris, de Bâle, de Marseille, de Lyon, de Bordeaux, ainsi que, moins connus, les musées locaux tels le musée d'Albi et le muséum de Gaillac. Il faut y ajouter les nombreuses collections privées que nous nous sommes attachés à ajouter à cet inventaire.


Ce travail se propose de dresser la liste des gisements connus et, pour chacun d'entre eux,
de compiler l'ensemble des données bibliographiques les concernant
puis de fournir la liste et le lieu de conservation des échantillons
.

Cet inventaire se déroulera en quatre chapitres correspondant aux quatre "étages" étudiés, Lutétien, Bartonien, Ludien, Oligocène (Stampien et Chattien). Mais avant cet exposé, pour chacun de ces "étages", nous évoquerons successivement :
. l'apport historique des vertébrés à leur étude et à aux datations,
. le cadre lithologique et stratigraphique,
. les paléoclimats et les paléoenvironnements ,
. les caractéristiques de leur contenu faunique.

suite. Les découvreurs. Un historique

Bibliographie du Tertiaire tarnais